Antigone malmenée
En prêtant à l'Antigone de Traetta une pensée visionnaire, la mise en scène la paralyse sous les symboles. A ntigona, de Tommaso Traetta (1727-1779), s'inspire de Sophocle mais substitue à la noire issue de l'original (la pendaison d'Antigone) une fin heureuse plus appropriée à la scène lyrique ici, Créon pardonne à Antigone d'avoir incinéré son frère Polynice. Grand connaisseur de l'opéra napolitain, Christophe Rousset a révélé au concert puis au disque la force dramatique de cette tragedia permusica. L'Opéra de Montpellier en présente une version scénique signée Eric Vigner. Affligeante, elle fait regretter le simple concert. Un décor entasse sur un même panneau noir et blanc le nom de la ville de Thèbes, un phallus éjaculant et une gigantesque limande ! Vigner abandonne les chanteurs bras ballants : "C'est une cérémonie d'achèvement sur les mines du monde dans un espace-temps indéfini à laquelle nous allons assister ", précise-t-il. L'opéra et le spectateur sont accablés par tant de prétention. Face à ce déluge de laideur, les musiciens écopent pour éviter le naufrage. Christophe Rousset anime et ordonne plus qu'il ne galbe son orchestre. Lui répond une distribution homogène et sûre. Malgré quelques passages en force, Maria Bayo donne au rôle-titre sa dimension dramatique et son caractère entier.
Le Monde de la Musique - mai 2004
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